LA CIVILISATION MUSULMANE
INTRODUCTION
La civilisation musulmane a pris forme au moyen âge mais depuis lors elle ne cesse de s’enrichir et de gagner de l’importance .L’islam n’est plus l’affaire des arabes mais la religion d’une vaste communauté qui du fait de sa diversité culturelle s’efforce de l’adapter à certaines réalités locales ou conjoncturelles.
A côté du dogme et du culte qui en sont les fondements. L’islam propose à l’homme un véritable code de conduite. A cet égard.la civilisation arabo-islamique rapproche à bien des égards les différentes composantes de la Umma
I- LA NAISSANCE DE L’ISLAM
L’islam est né en Arabie, terre de désert et de steppes, donc de zones arides. Le climat a modelé le genre de vie et par conséquent l’histoire. Ce déterminisme géographique est fondamental et le terme « arabe » lui-même veut dire nomade. La péninsule arabique est située au sud des deux grandes puissances de l’époque : l’empire perse et l’empire byzantin. Elle a connu de brillantes civilisations. L’Arabie centrale, peuplée de bédouins nomades et éleveurs de dromadaires reste le domaine de tribus et de clans placés sous l’autorité morale d’un Cheikh élu.
La naissance de l’islam est intimement liée à celle de son prophète, Mahomet. Sa date de naissance est controversée, mais les lettrés et des historiens musulmans s’accordent à dire qu’il est né durant l’année de l’éléphant c’est-à-dire en 570 a la Mecque, d’un père appelé Abdallah et d’une mère du nom Aminata. Il appartient par son père au clan des hachim de la tribu des Koraïchites. Il appartient donc a deux clans sacrés qui avaient en partage le commandement militaire. Orphelin à six ans et pauvre, Mahomet est recueilli par son oncle Abu Talib, un commerçant caravanier qui l’emmène souvent en Syrie. Ensuite il se met au service d’une riche veuve, Khadija, propriétaire de caravanes, qui fit de lui son homme de confiance. Il finit par l’épouser en 595. C’est en 610 que Mahomet a reçu la révélation divine à l’âge de 40 ans. Il avait coutume de se retirer dans une grotte du mont Hira près de la Mecque pour méditer et c’est là qu’il entend l’appel de l’ange Gabriel. Ainsi commence la révélation coranique. Prêchant la croyance en un Dieu unique et la lutte contre les idoles, il s’attira des fidèles mais aussi une opposition d’abord méprisante puis de plus en plus violente de l’aristocratie de la Mecque. Parmi les premiers musulmans, on peut citer Khadîdja, son épouse, Ali, Zaide Ben Haritan, un esclave syrien libéré adopté par le prophète. Le quatrième fidèle est un riche négociant de la Mecque, Abu Berk. En 619, Mahomet perd son épouse et son oncle protecteur Abu Talibé. Cette double perte constitua une menace pour sa vie. C’est pourquoi, il songe à l’exil et répond en 622 à l’invitation des habitants de Yathrib devenue Médine. Mohamed organise la vie de la nouvelle communauté et jette les bases d’un Etat. Il entre en lutte ouverte avec la Mecque, lutte marquée par des succès (Badr, 624) et des revers (Ehud, 625). Il gagne l’appui des troupes bédouines. Après l’échec d’une tentative mecquoise, il use de diplomatie pour le pèlerinage à la Mecque en 629. L’année suivante, Mahomet s’empare facilement de la Mecque, brise les idoles et eut le ralliement des mecquois. Il reviendra pour la dernière fois dans sa ville natale pour le pèlerinage d’adieu et meurt quelques mois plus tard à Médine en 632.
II- LE CORAN ET LES FONDEMENTS DE L’ISLAM
1- Le coran
Le coran texte sacré que l’on récite, constitue le message de Dieu. Il est la parole même de Dieu, une dictée surnaturelle. Le prophète l’a reçu par fragments immédiatement notés par des fidèles. Le texte définitif a été établi sous le calife Uthman. Il compte 114 sourates (chapitres) et 6236 versets. Le coran appris par cœur dès l’enfance imprègne toute la vie des croyants. Il constitue un système complet qui répond à tous les problèmes de l’homme et de la société. Le coran constitue un message à la fois religieux, politique, juridique et moral. Il est l’élément essentiel du monde musulman qui forme une communauté appelée Umma. Malgré cette clarté l’exégèse du coran fait naitre plusieurs contradictions et des querelles d’écoles. Il existe quatre écoles d’interprétation coranique : les Hanéfites (Abu Hanifa), les Malikites (Malik ibn Anas), les Hanbalites (Ibn Hanbal) et les Shaféites (Asfi).
2- Les fondements de l’islam
Il suffit d’attester qu’ « il n’y a de divinités qu’Allah et Mahomet est l’envoyé de Dieu » pour être musulman. Islam signifie « soumission à Dieu » il est la croyance en un Dieu unique, éternel, omnipotent, créateur et juge. Ce Dieu inaccessible a parlé aux hommes par l’intermédiaire du prophète. L’islam se place dans la succession des autres religions monothéistes : judaïsme et christianisme. La prière constitue le devoir fondamental. Elle doit être dite 5 fois dans la journée et constitue un acte de générosité pour remercier Dieu. Le pèlerinage à la Mecque doit être effectué une fois dans sa vie pour tout croyant qui a les moyens. Il a permis au prophète de conserver des rites antéislamiques en leur donnant une signification nouvelle rattachée au souvenir. L’islam interdit l’alcool, le sang et la viande de porc, les jeux de hasard et le culte des idoles.
III- LES MOYENS DE DIFFUSION DE L’ISLAM
L’islam se répand d’abord par la conquête ou guerre sainte. Avec l’exode à Médine en 622, l’islam prit sa force définitive de communauté à la fois et religieuse. D’après les coutumes du désert un tel exode était une déclaration de guerre. Ainsi l’islam va se développer dans une atmosphère de lutte et de guerre malgré les longues périodes de paix. Le coran lance l’appel à la guerre sainte et loue le courage devant l’ennemi. Mahomet avait eu à lutter contre les polythéistes de la Mecque. Son successeur Abu Bekr eu à réprimer la révolte de la Mecque. Cependant l’islam ne progresse pas uniquement par les conquêtes. Il y eut des conversions en inde et en Afrique. L’expansion de l’islam se poursuit par l’action des rois et des sultans des Etats.
L’islam s’est aussi répandu par le biais du commerce surtout en Afrique. Les produits du commerce sont l’or l’ivoire et les esclaves. Ainsi l’aristocratie se convertit pour tirer profit du commerce d’où la conversion politico-économique. A l’action des commerçants il faut ajouter celle des grands nomades sahariens musulmans (almoravides).
L’action des confréries et des marabouts a été déterminante pour l’islamisation en masse surtout en Afrique noire : tidjanisme et mouridisme au Sénégal.
IV- LA CIVILISATION MUSULMANE
L’islam a légué à l’humanité une brillante civilisation, une culture très riche dont l’âge d’or correspond au moyen âge occidental. L’islam a assuré la prospérité des villes par l’artisanat et le commerce. Le textile est l’activité dominante et plusieurs pays ont leurs spécialités : l’Iran puis la Turquie pour leurs tapis, l’Egypte pour ses toiles de lin, Damas pour ses étoffes, Mossoul pour sa mousseline. Le travail du cuir excelle au Maroc et à Cordoue d’où est venu le mot cordonnier. Les artisans du cuivre du verre de la céramique produisent des chef-œuvres et plusieurs techniques sont adaptées par l’Occident.
En matière commerciale, les arabes ont été très pratiques. Ainsi les bazars, douanes, magasins, chèques viennent de l’arabe. Les arabes ont également apporté dans le domaine scientifique des notions fondamentales. Les apports remarquables ont favorisé l’épanouissement intellectuel de l’Occident au XIII siècle. En Mathématiques de chiffre zéro et le x de l’inconnu viennent de l’arabe. Les arabes ont fait progresser la trigonométrie : au sinus et cosinus empruntés aux Hindous, ils ont ajouté la tangente et la cotangente. Ils ont transmis aux Européens la boussole, une découverte chinoise.les arabes ont investi tous les domaines : médecines, chimie, philosophie, géographie, histoire etc.
Ainsi, c’est par l’Espagne que l’Occident chrétien est entré en contact avec la culture musulmane. De nombreuses œuvres arabes ont traduites en latin pour une large diffusion dans les centres comme la Sicile et Tolède.
V- UNITÉ ET DIVERSITÉ DU MONDE MUSULMAN
L’islam n’est pas figé dans sa pratique. Le dogme et le culte sont immuables et ne peuvent être nullement remis en question. Le coran ne peut faire l’objet d’une modification quelconque dans sa forme. Cependant tout ce qui se rapporte à la morale et aux rapports sociaux est susceptible d’évoluer à l’image des conditions d’existence et de vie des hommes. La Umma est devenue aujourd’hui un vaste ensemble cimenté par les fondements de l’islam mais assez hétérogène du fait de la diversité des peuples qui la composent. Les particularismes locaux se traduisent alors par des différences de conception et d’interprétation sur certaines questions liées au vécu quotidien des hommes.
1- les facteurs d’unité de la Umma
Le mode musulman constitue dans une certaine mesure, un bloc que régissent en principe le coran, la sunna et dans une moindre mesure la charia. Le dogme et le culte sont aussi des facteurs d’uniformisation au-delà des différences ethniques et culturels.
La langue arabe qui est la langue du coran est un facteur important de rapprochement et d’unification des musulmans. Son apprentissage est une condition essentielle pour mieux connaitre et pratiquer l’islam. C’est aussi un moyen d’accès à la culture arabe que beaucoup de fidèles assimilent à une forme d’expression sacrée. Le souci de traduire l’image d’une Umma unifiée explique certaines initiatives qui sont prises pour mettre sur pied des organisations politico-religieuses régionales ou universelles.
L’Union du Maghreb arabe ou l’organisation de la conférence Islamique en sont des exemples. Le panarabisme et le panislamisme sont des idéologies qui participent de cette même volonté d’union et de cohésion des arabes et de tous les musulmans.
La Umma est certes une réalité géographie et religieuse, mais, elle demeure un idéal, en tant que communauté religieuse consciente de ses intérêts et parlant d’une même voix au nom de l’islam.
2- La diversité du monde musulman
Les différents peuples qui composent la Umma s’expriment dans des langues différentes et évoluent dans des réalités spécifiques.
La rupture religieuse intervenue au 7é siècle se traduira par une division politique ( Caire, Cordoue, Bagdad) et subséquemment par trois systèmes philosophiques : la pensée des uléma ( respect de la tradition) , celle de Mutazila ( rationalisme grec) et celle de la sufiya(mystique musulman).
Aujourd’hui encore la division entre Sunnites et Shiites est une réalité et la diversité se précise davantage avec le développement de branches rigoristes issues de l’ancien camp Kharijite qui veulent conserver l’islam dans sa pureté originelle. Le mouvement Ibadite en est un exemple. Si pour tous les Sunnites, le coran et la Sunna constituent des références communes, le classement des autres sources de droit n’est pas la même :
- l’école Malikite : elle se réfère respectivement au coran, à la Sunna, à l’Ijma (communauté, consensus) et au ray Sa présence est très forte à Médine, au Maghreb et en Afrique noire.
- l’école Hanafite : son choix est porté respectivement sur le coran , la Sunna , le Khats ( analogie) et le Ray . Son aire de diffusion couvre l’Irak, la Jordanie, la Basse Egypte etc.
- L’école Shaféite : ses références sont, dans l’ordre le coran, la Sunna, le Khiyas et l’Ijma. Elle est répandue en Egypte, en Asie du Sud-est au Moyen-Orient et en Afrique
- L’école Hanbalite : à part le coran et la Sunna, elle ne connait aucune autre Cette école est fortement représentée en Arabie Saoudites et en Syrie.
Les musulmans d’Europe sont à bien des égards différents de ceux d’Afrique noire ou l’islam est pris en charge par les confréries.
Au Sénégal nous avons les Khadres, les Tidjanes, les Mourides, les Layennes etc. Au sein de la communauté Tidjanes par exemple nous avons les Niassénnes, Tivaouane, Thiénaba etc. A côté des divergences, des éléments de contrastes apparaissent, pour certains, comme une nécessité d’adapter l’islam au monde moderne et aux exigences du développement économique et social. Les initiatives dans ce sens se réfugient dans cette recommandation divine « Croyez en Dieu, à son prophète et à ceux qui détiennent l’autorité parmi vous ». c’est ainsi qu’au Maroc ,l’idée a été émise pour la Tabaski de se contenter du mouton symbolique du roi pour toute la nation . En Indonésie, il a été ordonné de jeûner le premier et le dernier jour du Ramadan par souci de productivité, le reste du mois étant à la charge du grand Mufti. En Tunisie , le pouvoir politique a une fois demandé aux populations de ne pas observer le Ramadan pour vaincre le sous-développement.
En Turquie, le Kémalisme en tant que document laïque autoritaire a opéré une véritable révolution dans l’islam en modifiant de façon notable les ordres social religieux et culturel. Des mesures comme la limitation du nombre de pèlerins pour pallier la fuite de capitaux, l’ablation de la main en cas de vol, la lapidation pour l’adultaire ne font pas l’unanimité au sein de la Umma . Le prêt à intérêt est condamné par l’islam mais il est aisé de remarquer que le système des crédits est aujourd’hui une composante essentielle dans les activités des banques.
La communauté musulmane est donc loin d’être un bloc monolithique. Malgré tous les efforts d’unification, elle offre encore l’image de communautés juxtaposées. Par ailleurs l’activité nous offre chaque jour des manifestations de violences ( en Afghanistan, en Tchétchénie, en Irak, aux Philippines etc.) qui du reste ne sont que la manifestation la plus violente et la plus visible de l’opposition entre la culture occidentale. Certains théoriciens occidentaux comme Samuel Huntington n’hésitent pas à faire de l’islam le nouvel ennemi de l’occident. Avec l’extérieur se pose donc un problème de communication entre les tendances les plus radicales de l’islamisme ( Iran héritiers de Khomeiny, Oussama ben Laden) et l’occident. Aux yeux de l’opinion islamique il y a un complot contre le leadership musulman.
CONCLUSION
La civilisation arabo-musulmane s’est forgée à partir d’une religion et de plusieurs éléments empruntés aux civilisations antérieures . L’extension de l’islam et de la culture qu’il véhicule a été fulgurante et n’a épargné aucun point du globe. Aujourd’hui l’islam est plus que jamais vivace malgré les problèmes que posent les fanatiques et les fondamentalistes . les détracteurs utilisent leurs actes pour aller en guerre contre cette religion ( la guerre en Irak, en Afghanistan), mais ils ne font que conforter par ce biais l’universalité de la religion.