LE MOUVEMENT DE LA NEGRITUDE
INTRODUCTION
Le mouvement de la négritude; L’immense prise de conscience des nègro africains de la nécessité de se battre pour la réhabilitation des valeurs du monde noir réalisé par les précurseurs de la négritude, trouvera un écho favorable en France. En effet la France constituait le lieu principal de rendez-vous des jeunes africains et antillais qui y poursuivent leurs études supérieures. Ainsi, ils entreront en contact avec la civilisation occidentale ce qui va occasionner une prise de conscience et un besoin de réhabiliter leur culture. La France sera donc le champ de bataille ou ils vont agir. Leur principal support sera les revues.
I-LES REVUES
A-LA REVUE DU MONDE NOIR (1931)
Cette revue bilingue parut du 20 novembre 1931 au 20 avril 1932. Ce fut la première tribune ou les Noirs du monde du monde entier eurent enfin l’occasion de s’exprimer pour débattre de leurs problèmes spécifiques. Cette revue fut fondée par un ressortissant Libérien le Docteur Sajous assisté de deux sœurs antillais Andrée et Paulette Nardal. Ce fut un lieu de rencontre fructueuses pour l’intelligentsia (ensemble des intellectuels) et en même temps un incontestable instrument d’éveil culturel.
Les six numéros livrés de la revue permirent l’établissement d’un véritable programme qui affirmait l’originalité de la personnalité Noire et réclamait une littérature authentique qui puisse enfin parler du Négre sans fard ni exotisme.
B-LEGITIME DEFENSE (1932)
Fondée par des antillais – Etienne Léro, René Menil, Jules Marcel Monnérot – elle se présente comme une réaction à ce qui faisait la Revue du monde Noir jugée trop « molle ».
Les animateurs de la revue vont sortir en 1932 (1 juin) un manifeste programme ou ils théorisent sur ce qui doit être la littérature antillaise. En effet, ces animateurs considèrent les écrivains antillais comme de simple copieurs des model occidentaux, en plus ils n’étaient pas à la pointe du combat pour le peuple.
C’est pourquoi, Légitime Défense proclame son refus des valeurs occidentales et du christianisme et affirme son adhésion au Marxisme et au Surréalisme.
Légitime Défense prêche pour une liberté de style mais aussi de l’imagination et du tempérament du nègre. L’écrivain noir doit assumer ainsi sa culture, sa race, sa couleur et se faire « l’écho des haines et des aspirations de son peuple opprimé ».
Il doit donc assumer sa négritude pour qu’enfin naisse une véritable littérature antillaise.
C-L’ETUDIANT NOIR (1934)
Si Légitime Défense fut une affaire exclusivement antillaise mais aussi de courte durée (un seul numéro ; pressions gouvernementales, suspensions de bourses et de subsides), L’Etudiant Noir par contre va réunir des étudiants d’origine diverses autour de Léopold S.Senghor, Aimé Césaire et Léon Gontran Damas.
L’Etudiant Noir était un petit périodique qui avait selon Damas « pour but de mettre fin aux systèmes claniques en vigueurs au quartier latin et de » rattacher les Noirs à leur histoire, leurs traditions et leurs langues » .
Selon Senghor, L’Etudiant Noir fut un instrument de lutte car à l’époque (1932-35) nous étions plongés avec quelques étudiants noirs dans une sorte de désespoir panique. L’horizon était bouché, nulle réforme eu perspective, et les colonisateurs légitimaient notre dépendance politique et économique par la théorie de la table rase. Nous n’avons estimaient-ils, rien inventé, rien crée, ni sculpté, ni peint, ni chanté… Pour assoir une révolution efficace, il non fallait d’abord nous débarrasser de nos vêtements d’emprunts, ceux de l’assimilation et d’affirmer notre être, c.-à-d notre négritude.
L’Etudiant Noir rejeta les thèses de Légitime Défense notamment le communisme et le surréalisme. Il prônait un retour aux valeurs spécifiquement négre. L’Etudiant Noir conscient d’apporter quelque chose aux cultures occidentales mais aussi le groupe Etudiant Noir prônait « la réconciliation des noirs avec eux- même, l’affirmation de leur singularité ethnique et la reprise en main de leur propre destiné ».
II-LA NEGRITUDE
La négritude est considérée par les intellectuels Noirs de cette époque comme un cri de ralliement qui leur permet de se définir par rapport à l’occident colonisateur et assimilationniste. Ce mot négritude est un néologisme que Césaire a employé pour la première fois dans le Cahier d’un Retour au pays natal. Négritude, a permis de valoriser le mot « négre » employé jusque là de manière péjorative. C’est un mot valorisant porteur d’espoir et d’une identité culturelle riche.
Pour Césaire « la négritude est la simple reconnaissance du fait d’être noir, et l’acceptation de ce fait de notre destin de Noir, de notre histoire et de notre culture » Elle traduit donc chez Césaire un besoin de libération et de dignité. Chez Senghor, « la négritude est le patrimoine culturel, les valeurs et surtout l’esprit de la civilisation négro africaine » Senghor met l’accent sur l’étude du passé africain et les sources afin de les valoriser ; la négritude est lui un humanisme, une voie de passage vers l’universel : elle est, d’abord, enracinement dans la culture africaine, et, « ouverture aux apports fécondants des autres civilisations ».
Quant à Damas, il dira dés le début du mouvement « la négritude tend à rattacher les noirs de nationalités différentes et de statuts français à leurs histoires, leur tradition et aux langues exprimant leur âmes ». Pour Damas, la négritude est donc le fait de défendre sa qualité de noir.
On peut donc dire que la négritude constitue l’ensemble des valeurs de la civilisation noire, la façon dont le négro-africain comprend le monde, la nature, les gens, les événements, mais aussi la façon dont il crée. En plus d’être un mouvement culturel, la négritude a aussi une dimension politique.
A-LA DIMENSION CULTURELLE DE LA NEGRITUDE
Le premier objectif de la négritude est le combat culturel qui vise à revaloriser, à renforcer et à faire connaitre les valeurs de la culture négre. Il s’agit donc de désaliéner culturellement le noir par un retour aux sources de la tradition. Ce combat se fera en trois phases :
- D’abord, cultiver le sentiment de la France par rapport à l’homme blanc en affirmant sa négritude.
- Ensuite, révéler l’essence de la race Noire, ses caractéristiques, ses qualités et ses défauts mais aussi son apport à la civilisation.
- Et, enfin s’orienter dans l’affirmation culturelle et non pas rester sur l’affirmation raciale afin d’éviter de tomber dans le racisme / seront des œuvres poétiques parmi lesquelles on peut citer : Pigments de Léon Gontran Damas (1937), Les armes miraculeuses de Césaire (1946), Cahier d’un retour au pays natal de Césaire (1939), Chants d’Ombre de Léopold Sédar Senghor (1945)
B-LA DIMENSION POLITIQUE DE LA NEGRITUDE
En plus de l’affirmation culturelle, la négritude a une dimension politique. Elle consiste à libérer politiquement le peuple noir du jouc colonial. Le colonialisme, il faut le rappeler, s’est fondé sur un prétendu domination culturelle. En effet, les colons justifiaient leur acte par une mission civilisatrice, car disent-ils, l’Afrique est un continent ahistorique et aculturelle. C’est pourquoi, la littérature qui est l’aspect culturelle de toute civilisation va s’engager politiquement afin de libérer le peuple opprimé. Senghor écrira en effet « au demeurant, cette lutte culturelle se doublait d’une lutte politique. La négritude était également arme de combat pour la décolonisation ». Quant à Césaire, il dira : « je pense qu’il peut y avoir indépendance politique sans indépendance culturel, mais je ne pense pas qu’il puisse y avoir indépendance culturelle sans indépendance politique ».
C’est dire donc, que le colonialisme est fondé sur le mensonge et des préjugés et qu’il se caractérise surtout par un impérialisme culturel et économique. Alors que Senghor dira que « la colonisation est un mal nécessaire », Césaire affirmera lui que « de la colonisation à la civilisation, la distance est infinie et colonisation égale chosification ».
CONCLUSION
Le mouvement de la négritude amorcé depuis les U E par les noirs américains, sera théorisé et mis en pratique dans les années trente par un groupe de jeunes intellectuels. D’abord culturel, le combat que même ce groupe sera politique car permettra de réclamer l’indépendance des colonies en Afriques. Ce combat pour la décolonisation sera l’œuvre des écrivains de la Négritude mais surtout à travers la Revue « Présence Africaine » qui se fera caisse de résonnance.