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LE THEATRE NEGRO-AFRICAIN

LE THEATRE NEGRO-AFRICAIN:L’Afrique a connu et pratiqué depuis ses origines un théâtre qui lui est spécifique. Ce théâtre trouve donc sa source dans le religieux. Les premières manifestations théâtrales sont engendrées par les rites, les cérémonies et les cultes religieux. C’est pourquoi, Moussinac écrit avec force que : « C’est sans doute dans l’animisme et dans la magie qu’il faut rechercher les origines vivantes du théâtre ».

I-EVOLUTION

Le théâtre négro-africain est né dans l’entre-deux guerres après le roman africain. Il s’est développé selon des étapes bien déterminées.

1-Le théâtre négro-africain traditionnel

Il ne se limite au religieux et au sacré. C’est aussi un théâtre profane. Il peut se faire à n’importe qu’elle période de l’année. Sa fonction est de consolider la vie du groupe. Il est un facteur d’unité sociale, une source de spiritualité, une thérapie pour les esprits troublés. Ainsi, toutes les cérémonies qui marquent les étapes importantes dans la vie de la communauté sont dramatisées : naissance, baptême, initiation, funérailles, etc.

2-Le théâtre populaire ou kotéba

La comédie des mœurs appelée « Kotéba » a toujours été pratiquée dans les villages bambaras. Elle met en scène le mari trompé, le marabout charlatan et sa victime etc. La farce et la caricature y tiennent une place importante. L’improvisation y est la règle. En Afrique, le théâtre traduit la totalité des manifestations de la vie. Il est le miroir où la collectivité tout entière doit se voir vivre et penser.

II-LE THEATRE A L’EPOQUE CONTEMPORAINE

 1-Le théâtre colonial

Le fait colonial va entraîner de nouvelles formes dramatiques. La colonisation devait porter un coup fatal au théâtre traditionnel par l’action des missionnaires. Aussi, avec l’institution d’un théâtre d’expression française à l’école William-Ponty et à Bingerville, les missionnaires s’attachèrent à détruire tout art indigène lié à l’animisme, aux croyances et aux civilisations négro-africaines. Les pièces représentées étaient dans le goût colonial. Elles sont organisées, orientées et contrôlées par l’administration coloniale. Ce théâtre scolaire ne donnait pas l’occasion de poser les véritables problèmes de l’Afrique

En prenant comme modèle le théâtre occidental, elle détruisait la conception que l’Afrique se faisait du théâtre. Désormais ce théâtre sera réservé à l’élite avec son spectacle clos et payant. Cependant, il attire l’attention des dramaturges sur le rôle que pouvait jouer l’art dramatique dans l’éveil des consciences et dans l’affirmation de l’identité culturelle.

2-Le théâtre moderne

C’est un théâtre qui inscrit son action sur les problèmes de l’Afrique. Il s’agit entre autres de se rapprocher des réalités du peuple afin d’être plus efficace dans la recherche de solution pour sortir l’Afrique de sa situation.

Il est le lieu d’expression privilégié pour dénoncer les méfaits du colonialisme. Le théâtre négro-africain moderne se présente aussi comme un centre d’observation des mœurs traditionnelle et modernes. L’analyse de l’Afrique nouvelle sera la 3eme orientation de ce théâtre. Il s’oriente dans deux directions : les pièces historiques et la satire des mœurs politiques et sociales.

La dénonciation du colonialisme et la lutte pour la liberté s’expriment à travers les pièces historiques dont la fonction est de revaloriser une histoire bafouée. C’est aussi l’occasion de stimuler les peuples en réactualisant les mythes par le biais des grandes figures historiques : Aline Sitoé Diatta, Béhanzin du Dahomey, Chaka, Alboury Ndiaye, Lat-Dior, etc. Les dramaturges en profitent pour réécrire l’histoire du continent tronquée par le colonisateur.  Ce théâtre militant est l’occasion de stimuler les peuples en réactualisant les mythes.  C’est dans ce sens que Cheik Aliou Ndao déclare : « Mon but est d’aider à la création de mythes qui galvanisent le peuple et portent en avant. Dussé-je y parvenir en rendant l’histoire plus historique ». En faisant renaître des héros épris de liberté et de dignité, le théâtre d’inspiration historique propose des exemples qui doivent être suivis afin de combattre le colonialisme et de lutter pour la liberté. C’est le cas d’Ibrahima Fall dans Le choix de Madior ; Cheik A Ndao dans L’exil d’Albouri ; Alioune Badara Bèye dans Nder en flammes ; Amadou Cissé Dia dans Les derniers jours de Lat Dior. Cette réhabilitation des grandes figures historiques est indissociable de l’exaltation des vertus qui ont toujours guidé dans la tradition. C’est le courage, les sens de l’honneur, la dignité …

Par ailleurs, le théâtre moderne fait la satire des mœurs politiques et sociales. Les dramaturges dénoncent la corruption, l’instabilité et la violence. L’appétit du pouvoir noté chez la classe politique fera l’objet de critiques sévères avec Bernard Dadié dans Monsieur Thôgô Gnini ; Maxime Ndébéka et Aimé Césaire successivement dans Le Président et La tragédie du roi Christophe.

Dans le théâtre moderne, cette satire est une forme d’engagement. Il s’agit d’avertir la société sur les dangers qui la guettent avec l’avènement de la civilisation industrielle. Ces dangers ont pour noms aliénation, dépersonnalisation, complexe. La satire vise certaines coutumes sociales anachroniques, le mythe des diplômes, l’exode rural, les conflits qui résultent entre tradition et modernité. Guillaume Oyono Mbia, Francis Bebey, Wolé Soyinka dénoncent ces pratiques respectivement dans Trois prétendants, un mari ; Le fils d’Agatha Moudio ; Le lion et la perle. Lorsque la tradition affronte le modernisme, il peut en naître des comportements ridicules. Oyono Mbia s’attaque à l’aliénation culturelle en fustigeant ceux qui se disent « évolués » au point de renier leur propre identité dans Notre fille ne se mariera pas.

CONCLUSION

Du théâtre traditionnel au théâtre moderne, on constate que l’art dramatique a eu un grand impact sur la marche des peuples africains. Il perpétue la cohésion et la stabilité du groupe. Malgré la main des missionnaires, les dramaturges sauront donner à ce théâtre une empreinte nationaliste à travers la peinture des figures exemplaires. C’est dire que le théâtre africain, à l’image des autres arts, reste est « un art fonctionnel et utilitaire ».

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